VICENÇ BATALLA. Non pas parce que, malheureusement, il n’y a pas toujours des guerres, mais celle de l’Ukraine est laquelle ressemble le plus à une Troisième Guerre mondiale, au moins pour l’Europe mais aussi pour le reste du monde, qui souffre de l’augmentation des prix de l’énergie et du manque d’aliments de base. Les artistes ne peuvent donc pas se sentir exclus de la situation. En première ligne, les Ukrainiens, mais aussi les Russes qui ont dû s’exiler pour ne pas servir de courroie de transmission à la propagande officielle de Poutine. Et en ce sens, Kirill Serebrennikov est représentatif de cette diaspora, cernée par la censure du régime de Moscou et la culture de l’annulation des militants les plus anti-russes.
Serebrennikov a ouvert la compétition du Festival de Cannes 2022 avec La Femme de Tchaïkovski (sortie française le prochain 15 février), puis le Festival d’Avignon dans la cour d’honneur du Palais des Papes avec sa version psychédélique du Moine noir de Tchekhov. La photo illustrant cette playlist des chansons de l’année a été prise lors des saluts à la fin de la pièce avec la déclaration sans équivoque Stop War projetée sur le mur du palais par le metteur en scène, au nom du Théâtre Thalia d’Hambourg, où il travaille désormais et qui fait écho à sa compagnie au Centre Gogol de Moscou poursuivie depuis des années.
Sans être directement lié, nous avons voulu ouvrir ce résumé sonore avec le titre qui débute le troisième album des Dublinois Fontaines D.C., aujourd’hui émigrés à Londres et intitulé en gaélique In ár gCroíthe go deo (Dans nos coeurs pour toujours). C’est une façon pour le groupe de se souvenir de ses origines, en se basant sur l’histoire vraie d’une femme irlandaise qui, lorsqu’elle est décédée il y a deux ans à Coventry, l’église anglicane n’a pas laissé sa famille mettre cette inscription sur sa tombe. Nous terminons la compilation avec une autre chanson, I Love You, du même album Skinty Fía (La Condamnation du cerf), qui est une autre lettre d’amour poétique à son pays et en même temps sur les atrocités vécues là-bas pendant des décennies.
Cette prière sonore tente de contrecarrer avec des mots comme ceux-ci un monde cruel, cynique et dévorant, afin de ne pas oublier que la beauté existe aussi. En deux heures et quart, toutes les chansons que nous avons aimées n’apparaissent pas et, comme toujours, il y a des références aux albums qui valent le coup qui n’ont pas pu rentrer. Avec l’aide habituelle des magazines Rockdelux, Les Inrockuptibles et The Wire, voici une liste non exhaustive de ceux qui auraient également pu figurer sur la playlist : Caroline (Caroline), Warm Chris (Aldous Harding), SICK! (Earl Sweatshirt), Nothing to declare (700 Bliss), LP.8 (Kelly Lee Owens), Hideous Bastard (Oliver Sim), God’s Country (Chat Pile), Hellfire (Black Midi), Nymph (Shygirl), Multitude (Stromae), YTILAER (Bill Callahan), ¡Ay! (Lucrecia Dalt), Un verano sin ti (Bad Bunny), Stumpwork (Dry Cleaning), Plonk (Huerco S.), (watch my moves) (Kurt Vile), Untitled (God) (SAULT), Cruel Country (Wilco), Tres golpes (Perrate), Mundos inmóviles derrumbándose (Nacho Vegas), Jo Jo Bobo (Hidrogenesse), Prypiat (Marina Herlop), Hex (Toundra), Architecture of Friendship (Santiago Latorre), No me miréis (Marinita Precaria), Flamenco. Mausoleo de celebración, amor y muerte (Niño de Elche), Segona florada (Pau Riba)…
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